Le dollar recule mais reste résilient face aux anticipations de baisse de taux de la Fed
Le billet vert tergiverse face à l’euro depuis le début du mois, au gré de l’évolution des anticipations de baisse des taux de la Réserve fédérale. Après avoir profité d’une diminution des anticipations d’une nouvelle baisse de taux de 25 points de base en décembre pour pousser l’EUR/USD à un plus bas de quatre mois autour de 1,15$, le changement de cap de ces anticipations a affecté le dollar ces derniers jours. La probabilité implicite d’un assouplissement lors de la réunion des 9–10 décembre est ainsi passée d’environ 90 % début novembre à près de 30 % la semaine dernière, avant de remonter vers 80–85 % cette semaine.
Ce yoyo particulièrement intense s’explique d’abord par des chiffres d’inflation moins « dociles » que prévu par les économistes. L’inflation totale et sous-jacente tourne encore autour de 3 % sur un an aux États-Unis, soit un niveau inconfortable pour une banque centrale qui vise 2 %. La situation est compliquée par l’absence de statistiques officielles pour octobre, le Bureau of Labor Statistics ayant dû repousser la publication du CPI et du rapport sur l’emploi à la mi-décembre à cause du shutdown, ce qui laisse la Fed « conduire dans le brouillard ».
Dans le même temps, des propos jugés accommodants de membres influents comme John Williams et Christopher Waller ont réancré l’idée d’une baisse de taux dès décembre. Il est aussi lié à la spéculation de la nomination du Conseiller économique de la Maison Blanche comme successeur à l’actuel président de la banque centrale à la fin de son mandat au printemps 2026.
Pour l’instant, malgré ce balancier incessant, la pression acheteuse reste dominante sur le billet vert. L’EUR/USD enchaîne des sommets de plus en plus bas, signe que chaque phase de rebond est utilisée pour se repositionner en faveur du dollar plutôt que pour relancer la tendance haussière de l’euro. Avec une probabilité de baisse de taux déjà très élevée en décembre, l’asymétrie se déplace à nouveau en faveur du dollar à très court terme. Si la Fed décidait finalement de temporiser et de renvoyer la prochaine baisse en janvier, en arguant du manque de visibilité sur les données d’octobre et de novembre, le choc de réajustement des attentes serait potentiellement plus violent que la réaction à une baisse déjà largement anticipée.
En face, le bloc européen commence à offrir un décor macro plus défensif pour l’euro. Les dernières données de l’ECB Wage Tracker montrent un ralentissement plus important que prévu des salaires négociés en zone euro. Ce tassement des salaires intervient alors même que la zone euro importe une partie de la faiblesse des prix en provenance de Chine, où l’inflation a oscillé plusieurs mois en territoire négatif et où les prix à la production reculent depuis près de trois ans. Pour la Banque centrale européenne, ce cocktail salaires moins dynamiques et désinflation importée milite pour un débat plus actif sur la reprise des baisses de taux en 2026.